mardi 10 mars 2009

Un aller simple

"Un soir où il déprimait à la bière, je lui ai raconté une des légendes de mon atlas. Ca se passait à Cuba, c'était l'histoire de José Luis, un garçon de notre âge qui chaque nuit devenait un jaguar, grâce à la magie vaudou qui apprend à sortir de ses rêves sous la forme que l'on veut. Et il consacrait ses nuits, José Luis, à essayer de séduire une femelle jaguar qui ne voulait pas de lui. Il était très malheureux et, au lieu de faire son travail de jaguar, chasser pour nourrir ses petits, il sombrait dans le désespoir - et de même pendant la journée, où il négligeait de couper sa canne à sucre pour soupirer après la femme d'un autre - si bien qu'à la fin les esprits vaudou en ont eu marre, et un matin on a retrouvé José Luis, sur son lit, dans son corps d'homme, dévoré par le jaguar de ses rêves.
Pignol avait haussé les épaules en disant que j'étais un utopiste. Ca m'avait déçu qu'il ne comprenne pas le sens de mon histoire, qui était pourtant clair : si on se laisse aller au désespoir, on finit mangé par les rêves qu'on a vécus de travers.
J'ai quand même cherché "utopiste", dans les dictionnaires de la FNAC. C'est un M. Morus qui a inventé ce nom en 1516, d'après les mots grecs signifiant "qui n'existe en aucun lieu". C'est agréable. "

Didier van Cauwelaert, Un aller simple.

dimanche 8 mars 2009

France Dimanche...

Une brasserie parisienne, comme tant d'autres... Je suis là, Porte d'Orléans, un dimanche midi.
Les salariés du déjeûner en semaine ne sont pas là. L'urgence non plus. Les couples d'amants de la fin d'après-midi non plus. Le dimanche midi, les brasseries sont prises d'assaut par les sorties en famille.
Des familles qui se retrouvent ainsi, trois générations ensemble, autour du gigot d'agneau. Le menu de la brasserie, c'est la lecture de la journée. C'est une activité qui dure un peu. Mamie sait qu'elle prendra du gigot, mais la lecture de tout le menu est nécessaire. C'est une lecture entrecoupée des questions bienveillantes de la fille ou du gendre, sur le confort de la banquette où trône grand'mère. Pas de grand'père à table. De toute façon, c'est la Journée de la Femme.
Le petit pleure dans sa poussette. La mémé s'attendrit un peu, puis se détourne. Il est un peu trop braillard, on n'aurait pas accepté ça, de son temps.
Le garçon du restaurant, qui est déjà passé deux fois, repart enfin avec la commande. Du gigot bien sûr, c'est dimanche. Un peu rosé, mais sans pommes-de-terre. Les haricots verts passent mieux.
Un silence s'intalle, de courte durée. La mémé est bien. La fille et le gendre sont heureux de voir que la mémé est bien. Le bébé est occupé à ronger avec méthode la lanière de la poussette.
Au fait, c'était bien le match hier ? Non, pas terrible... 3-0, j'ai éteint la télé avant la fin.

-"C'est pour qui le haut de dorade ?" La mamie n'est pas servie la première. Le reste de la commande arrive bientôt. Les trois générations sont bien. La France du dimanche est bien.

La France entière ? Sans doute pas. A une autre table, une fillette de huit ans se fait attraper par son père. Elle a du mal à finir son plat. Toute la famille a déjà fini, sauf elle. Elle minaude, avale une petite bouchée et la garde si longtemps dans la bouche qu'elle n'a sûrement plus de goût.
Je l'aperçois de dos. Sa petite queue de cheval blonde tranche avec les cheveus bruns et courts de son père, placé en face d'elle. La fillette tourne la tête vers sa mère, en espérant un secours qui ne viendra pas.
Un peu plus tard, le père quitte seul la table après s'être emporté une nouvelle fois.
-"On dit MERCI MAMAN", hurle-t-il au visage de la frêle silhouette. Les voisins tournent la tête, commentent l'incident, se disent sans doute que c'est un vrai père avec l'autorité qu'il faut. C'est si rare aujourd'hui...
Puis la mère et la fillette à la queue de cheval quittent enfin la table à leur tour. La petite fille se tourne vers moi en mettant son manteau. Elle a une tête d'ange, et le regard du Petit Prince de Saint-Exupéry. C'est une princesse, c'est évident, et son père ne l'a même pas vu.

A l'évidence, si c'est la Journée de la Femme, ça n'est pas nécessairement la fête des princesses.

Ar Miliner, Les pensées du meunier.

vendredi 6 mars 2009

Extatic music

La musique, et l'extase qu'elle donne à qui sait l'entendre et la toucher.
A écouter dans la pénombre sans modération, en fermant les yeux et en caressant avec douceur la peau de celui ou celle qui voudra ou que vous choisirez. C'est sur http://images.google.fr/imgres?imgurl=http://fc02.deviantart.com/fs14/f/2007/076/6/c/My_lovely_by_SilverMixx.jpg&imgrefurl=http://profile.myspace.com/index.cfm%3Ffuseaction%3Duser.viewProfile%26friendID%3D179010958&usg=__Gbqa1bsbQZzR1lyNVge_y-I0YTo=&h=599&w=415&sz=84&hl=br&start=818&tbnid=0HneEdeKLA307M:&tbnh=135&tbnw=94&prev=/images%3Fq%3Dlovely%26gbv%3D2%26ndsp%3D18%26hl%3Dbr%26sa%3DN%26start%3D810

et ça doit être très bon. La musique ne s'écoute pas seulement, elle se caresse.



mercredi 4 mars 2009

Gentleman biker ?

Cette semaine, ou la suivante. Le temps que je remette mon écurie en état pour faire dormir le cheval.
Et puis les bottes, et le reste. Avec le moulin et la monture, je serai un vrai gentleman farmer.

mardi 3 mars 2009


Les oiseaux du jardin ne sont pas simplement jolis. Ils sont essentiels.

lundi 2 mars 2009

Le défaut de sincérité, ô ami, fait de toi une ombre.
Tu ne vis plus que pour l'image de toi-même.
Quel étrange spectacle que celui d'un homme conduit par son ombre !
Lève donc les yeux vers le soleil de l'Être et comprends la source de la vérité et de l'illusion.
Ne reste pas prisonnier des regards de ce monde.

Faouzi Skali (XX° siècle)

dimanche 1 mars 2009

Education d'une fée


"Un grand vide se fait dans ma gorge. Je n'arrive plus à être malheureux devant cette fille. Je ne sais pas ce que je ressens. Elle ne m'excite pas ; elle m'enchante. Elle doit penser que je la drague et c'est moi qu'elle séduit, sans le vouloir ; tout m'attire en elle et rien ne me retient : j'aime qu'elle soit près de moi et je n'ai pas envie d'elle. Moi qui n'ai jamais conçu l'amitié avec une femme autrement qu'en étant son amant, et inversement, je me sens complètement chaviré par ce coup de foudre sans passion ni désir, ce lien déjà si profond, si intime, avec cette petite Irakienne qui parle ma langue mieux que moi, qui démonte mon pays pour me faire voir combien les rouages en sont absurdes, et qui évoque le ratage de sa vie avec autant de lucidité que je vis l'effondrement de la mienne. "

Dominique von Cauwelart (L'éducation d'une fée).