Armel Renault |
Cela fait juste deux ans aujourd'hui, mais c'était hier. Incrédules, puis révoltés d'une telle injustice de la vie, tes amis et ta famille ont accompagné et dispersé tes cendres autour du moulin de Bertaud.
Je suis revenu plus tard errer près du moulin. A ma vue, les colombes de la ferme proche sont venues à tire d'ailes m'assurer que tu étais bien là. Dans le silence de la colline qui surplombe Bain-de-Bretagne, même les oiseaux se sont tu en restant près de moi. Nous étions ensemble à sentir ta présence pour toujours en ce lieu dans lequel tu avais su auparavant distiller tant de magie.
Ce que j'avais à te dire, je te l'ai déjà dit mais je reste aujourd'hui encore avec le goût ambigu de ce silence. Le silence, cette antichambre de l'isolement, du repli et de l'incompréhension...
Notre sœur Annaig a su dire les choses avec pudeur, douceur et complicité. Je me souviens encore de certains de ses propos.
Erruet out e penn hent mab-den, Armel, er vro dianav da bep hini ac’hanomp : bro ar c’hevrin meur… N’eus bet den distroet evit he c’hontañ deomp. Bremañ e ouezez. Dizoloet ac’h eus ar pezh a blije dit kement : kompren teñzor ar vuhez…Te voici arrivé, Armel, au bout du chemin des hommes, dans ce pays qui nous reste totalement inconnu : le pays du grand mystère… Personne n’en est jamais revenu pour nous en dire quoi que ce soit. Maintenant, toi, tu sais. Tu y as découvert ce qui te plaisait tant : d’autres façons d’être.
Des chants pour rire, des chants à danser. Ah ya, na pegen brav da vouezh pa oaz o kanañ ha diskanañ er festoù-noz ! Ha soñj 'm eus c'hoazh pegen laouen e oamp o kanañ asamblez e Pederneg da genstrivadeg kan-ha-diskan. Ar c'hentañ prizh ! Ya, ar c'hentañ priz... Lama Meur ha Yann-Vari oc'h ober dañsal kantadoù tud , hag anezho ar re wellañ e Breizh evit ar mare ! Pelec'h emañ bremañ skeudennoù ar fest, nemet em fenn hag em spered...Oui, Armel, tu aimais les modes culturels différents, le patrimoine qui en découlait et tu y as donné beaucoup de ton temps. Tu aimais montrer les objets forgés par l’Homme et trop vite oubliés de lui, tu aimais les langues qu’il avait imaginées pour dire les replis de l’âme, et tu les transmettais. Enfin, par-dessus tout, tu étais passionné par ce que l’homme avait su faire de ces langues que tu parlais : des chants pour rire, des chants pour pleurer, des chants pour questionner l’incompréhensible de la vie.
Hier, Annaig s'est élancée à son tour dans l'odyssée des Celtes, vers ce pays du grand mystère comme elle le nommait. Une autre révolte, une autre injustice de la vie biologique. Ce ne sont pas des colombes, mais deux moineaux sur la haie qui m'ont annoncé son grand départ, en même temps que mon téléphone sonnait.
Nous nous retrouverons tous ensemble dans la grande lumière qui nous guide sur Terre, que nous craignons et qui nous attire. Nous nous retrouverons à faire danser les Bretons de Tír na nÓg sur un air de pachpi. Nous nous retrouverons pour discuter de ce silence que je n'ai pas compris. Et ça sera bien. Ha plijadur 'vo, ya sur !
© Yann, Soñjoù ar meilher.
Ya, kollet 'teus ur breur ivez, nevez zo... Kriz ar blanedenn. Mankout a ra din ar gerioù a vefe ret lavar.
RépondreSupprimerA galon ganit.